Les feuilles pas mortes

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mercredi 30 août 2023

Ca va aller, tu vas voir - Chrìstos Ikonòmou

ca_va_aller.jpg Chrìstos Ikonòmou est un auteur grec, né à Athènes en 1970.

Je ne l'avais jamais lu avant de lire ce recueil de nouvelles mettant en scène des habitants des quartiers populaires (pauvres donc) du Pirée.

Le livre a paru en français chez Quidam, en 2016, dans une traduction de Michel Volkovitch. D'ailleurs le titre en grec se rapproche davantage de "Il va se passer quelque chose, tu vas voir" (quelque chose de bien ou non). En français, le titre se montre un peu plus optimiste, alors que les nouvelles ne le sont pas. Oui, car il faut le dire, si vous avez envie d'une lecture pour vous remonter le moral, fuyez ! Non, c'est bien écrit, avec un style un peu abrupt, des redondances et répétitions (qui montrent bien aussi le cercle de la misère et l'enfermement des protagonistes dans leur condition), certes, mais j'ai trouvé ces nouvelles plombantes. Trop réalistes peut-être? Ou alors, c'est plombant car depuis son écriture les temps sont encore plus durs? Je ne sais pas.
Bref, je l'ai lu, j'ai trouvé intéressant mais l'ouvrage me laisse un goût amer, ce qui finalement est peut-être une bonne chose si le recueil a pour but de dénoncer la pauvreté et de créer une réaction pour faire un peu changer les choses.

On l'appelle Mao. Quand il est né, à ce qu'on dit, il était jaune comme un Chinois. Sa mère et ses sœurs aussi l'appellent comme ça. Mao. Son père, ça fait des années qu'il s'est fait tué sur un pétrolier à Pèrama. Communiste mais paisible et souriant. C'est lui qui l'a appelé Mao. Même aujourd'hui que c'est devenu presque un homme tout le quartier l'appelle Mao. Comment ça va Mao? Je vous emmerde, idiots. Sa grande soeur Katerìna s'est fait violer cet été dans la carrière à Katràkio. C'était des types de Korydallos, il paraît, de la place Mèmou. Depuis on ne l'a plus revue. Sa mère l'a envoyée dans de la famille sur une île - Chios ou Samos, on a dit. Personne ne sait au juste, c'est resté secret.


Aujourd'hui on a reçu un nouveau rappel de la banque. Ils disent que c'est le dernier et que la semaine prochaine ils prendront "les mesures prévues par la loi". Ils ont déjà téléphoné plusieurs fois mais Nìki n'a pas répondu. Elle a laissé le papier sur la petite table du salon.


Perdre son boulot c'est comme se casser la jambe. Au début tu ne sens rien, a dit Aris, la fracture est encore chaude et ne fait pas mal. La douleur et la peur viennent quand ça refroidit. Quand tu penses au loyer aux factures aux petites annonces dans les journaux. Les coups de fil chaque matin, les voix dures. Un autre a pris la place mon vieux. Rappelle demain.


Quidam éditeur, 20 €.

Pour aller plus loin :

dimanche 14 juin 2015

La Fleur rouge - Vsevolod Garchine

lafleurrouge.jpg Ce court récit de Vsevolod Garchine nous plonge dans un asile de Petite Russie (aujourd'hui l'Ukraine)à travers l'histoire d'un dément (dont nous ne connaîtrons ni l'identité ni le passé). Froid, clinique, mais poétique, ce court texte mérite le détour. Aucune excuse pour ne pas le lire : il est disponible aux éditions de l'Arbre vengeur au prix de 6€, sur wikisource et sur Youtube en version audio !



Le nouveau venu fut introduit dans la salle où se trouvaient les baignoires. Cette salle aurait pu causer une sensation de malaise à une personne saine : son effet sur une imagination troublée et excitée fut d'autant plus pénible.

- Vous savez où vous êtes? - Certainement, docteur; je suis dans une maison de fous. Mais, du moment qu'on le comprend, c'est absolument indifférent, absolument indifférent!"


Non loin du perron poussaient trois plants d'une espèce particulière de pavot, beaucoup plus petite que le pavot vulgaire, et s'en distinguant par l'éclat insolite de ses pétales rouges. C'était cette fleur qui avait frappé l'aliéné lorsque, le jour de son entrée à l'hôpital, il avait entrevu le jardin à travers la porte vitrée.

Grimmy

dimanche 23 novembre 2014

La Salamandre - Ibuse Masuji

lasalamandre.jpg Dans ce recueil de nouvelles disponible en Picquier poche, le Japonais Masuji Ibuse, nous offre six textes mêlant regard pointu sur la société, finesse psychologique et références aux contes traditionnels. Que dire si ce n'est que c'est très bien écrit (avec une mention donc pour la traductrice Martine Jullien, puisque je ne lis pas le japonais) et d'une extraordinaire délicatesse... Les animaux sont très présents dans ces récits et leurs situations font souvent écho aux tourments internes des hommes. Prenez le temps de découvrir cet auteur et son regard bienveillant sur la société japonaise, ses hommes, la vie. Pour ma part, je poursuivrai cette lecture par Pluie noire.


Elle eut l'idée de nager en rond, en essayant de profiter au maximum de l'espace dont elle disposait. Ainsi font les hommes quand ils broient des idées noires. Mais le logis de la salamandre était loin d'être assez vaste pour lui permettre de tourner en rond.


Dix ans, déjà, que me voilà tracassé pour une histoire de carpe.


M'étant approché sans bruit de l'oie blessée, je la soulevai de mes deux mains. J'eus aussitôt l'impression que la chaleur de son plumage d'oiseau migrateur passait doucement dans mes bras. Ma surprise de la trouver si lourde éclaircit quelque peu le sentiment de tristesse qui ne me quittait pas cette année-là.


Elle avait l'air grave, elle était plongée dans ses pensées. Elle n'avait cessé de joindre ses deux mains exactement comme si elle avait gardé précieusement un grillon qu'elle aurait attrapé. Puis elle avait paru embarrassée, comme si elle ne savait plus que faire du grillon qu'elle avait dans les mains et, une fois passée la gare de Yokohama, elle m'avait adressée pour la première fois la parole.


Pour tout dire, les cinq yens de la nuit précédente étaient depuis longtemps dépensés - en tabac, enveloppes, cordonnier, dîners -, rien n'allait comme je voulais. J'étais bien plus tracassé par le billet de cinq yens et par la boîte de gâteaux que si j'avais commis un vol. Quand j'étais enfant, j'avais une fois volé l'offrande de l'autel de Bouddha pour m'acheter un hameçon, mais cela ne m'avait pas préoccupé à ce point.


- Ces gens qui ont la manie d'écrire des lettres, ça les fait presque tomber en extase. Ils écrivent, ils effacent, ils sont complètement pris. Il leur arrive même d'écrire des choses qu'ils ne pensent pas. Ca n'est pas vrai, madame? - Plus ou moins... Et puis mon Shunmi, il met aussi des poèmes dans ses lettres, je peux bien vous le dire. Même quand il est en train de manger, il lui arrive parfois de compter sur ses doigts cinq-sept-cinq.



Grimmy

lundi 17 février 2014

Au coeur des ténèbres - Joseph Conrad

coeurtenebres.gif Je ne vous ferais pas l'affront de vous présenter Joseph Conrad (Wikipedia le fera très bien pour moi au cas où vous souhaiteriez réviser vos classiques anglais). C'est un auteur dont j'aime la plume, que je trouve vive et expressive. J'avais déjà pris du plaisir en lisant Nostromo (qui est très long) et me suis donc lancée gaiment dans Au coeur des ténèbres (ben oui, faut bien y aller gaiment, car c'est tout sauf une lecture gaie).

Vous aimez l'aventure, le goût du risque et de la sueur, côtoyer une folie "exotique"? L'Afrique noire et le commerce de l'ivoire vous intrigue? Si oui, vous devriez apprécier Au coeur des ténèbres (si non, vous pouvez essayer quand même, le risque est limité finalement quand on lit). Pour ma part, j'ai aimé, sans tout comprendre (faut dire aussi que parfois je lis la nuit ou tôt le matin et que mes yeux et mon cerveau sont quelque peu endormis). Le texte est court, percutant et réussit bien à transmettre une ambiance malsaine, mystérieuse, envoûtante.

Le texte a été édité dans la collection L'Imaginaire de Gallimard. J'aime cette collection mais y ai vu quelques coquilles (des mots oubliés surtout), dommage pour un ouvrage publié par une grande maison (ah là là, tout se perd, ma bonne dame, tout se perd). Ceci dit, l'édition est très agréable (joli papier, texte aéré et intéressante suggestion de lecture pour ceux qui ont aimé Au coeur des ténèbres) et propose en bonus sur un dvd le film Apocalypse Now. Un joli cadeau pour 12€50.

Quelques extraits apéritifs :

Il était le seul d'entre nous qui courût encore les mers. Le pis qu'on eût pu dire de lui, c'est qu'il ne représentait pas son espèce. C'était un marin, mais un vagabond aussi, alors que la plupart des marins mènent, si l'on peut ainsi s'exprimer, une vie sédentaire.


Une terreur aveugla avait tout dispersé, hommes, femmes, enfants, dans la brousse : et ils n'étaient jamais revenus. J'ignore ce qu'il advint des poules.


"Ne soyez pas si sûr de votre affaire... L'autre jour, j'en ai chargé un qui s'est pendu en route. Et c'était un Suédois!.. - Pendu! m'écriai-je. Et pourquoi, grands dieux!" Il ne détourna pas son regard vigilant. "Que sais-je!... Sans doute en avait-il assez du soleil ou du pays peut-être..."



Et pour aller plus loin (en digestif donc) :
une page d'un passionné de romans d'aventure,
une page-ressource sur l'auteur,
la page wikisource proposant ses ouvrages
une lecture de la nouvelle

Grimmy

mercredi 15 janvier 2014

Le Koala tueur et autres histoires du bush - Kenneth Cook

koalatueur.jpg En ce début d'année gris-souris, je vous présente mes meilleurs voeux de lecture, découverte, écritures,... (et de tout ce que vous désirez pour 2014)! Pour ma part, j'entame l'année avec -enfin!- un nouveau compagnon informatique de choix sur lequel il est plaisant de naviguer et pianoter. Autant vous dire que si j'avais pris la résolution d'être moins sur écran, je serais mal barrée ! poin poin poin - sifflote (non, ce n'est pas vrai, je ne sais pas siffler et encore moins siffloter, sifflouiller peut-être, mais je m'égare).

Bref, revenons-en à nos koalas, pour ne plus les voir d'un même oeil et pour assouvir votre soif de connaissance sur crocodiles, serpents, chats et chameaux qui puent du bec, vous pouvez vous plonger sans réserve dans ces quinze histoires que l'auteur présente comme incroyables mais vraies. Alors, je ne sais pas si elles sont vraies, pour le coup, mais en tout cas elles sont réellement dignes d'intérêt car Kenneth Cook savait vivre et raconter des histoires, c'est indéniable. Il se moque de lui-même et narre avec un regard bonhomme des anecdotes plutôt drôles (bon elles sont drôles parce qu'il peut nous les raconter et parce qu'il a justement un regard assez distant sur ce qu'il aurait vécu mais ne vous attendez pas à du gentillet non plus).

C'est léger (mais pas tant que ça), exotique, enlevé, bien écrit. Bref, ça fait du bien de voyager un peu ! Lire Cook, c'est un peu comme écouter après un bon repas les aventures d'un Tonton baroudeur mais maladroit à qui l'impossible peut toujours arriver. Je lirai probablement d'autres de ses ouvrages, avec pour seul regret que Cook, qui aimait la nature et les papillons (il a fondé le premier parc aux papillons en Australie), n'avait pas le coeur si bien accroché puisqu'il nous a quittés en 1987, au bord d'une rivière.

Le texte intégral, traduit et postfacé par Mireille Vignol, est disponible au format poche aux éditions Le Livre de poche pour 6 € (bon, c'est peut-être 6,10 € aujourd'hui, là j'ai une édition précédente à 6€ que l'on m'a prêtée, qui vient de Nouvelle-Calédonie avec une étiquette mentionnant 1095 francs pacifiques, ce qui fait 9.18 €). Eh oui, acheter des livres dans le Pacifique est plus cher, la preuve en est ! Sur ce, je vous laisse en compagnie de quelques extraits du bush :

- Y a deux choses qui font pas bon ménage, proféra Blackie d'un ton pédant : l'alcool et les serpents. L'idée de mélanger les deux ne m'avait jamais traversé l'esprit, mais j'acquiesçai gravement. Acquiescer gravement est l'une des rares réactions possibles quand on parle avec des montreurs de serpents, car tout dialogue est exclu : ils vous racontent des histoires de reptiles, un point c'est tout.

J'étais alors moins corpulent qu'aujourd'hui, mais je n'en restais pas moins un homme bien en chair. Comprenez par là que tout en parvenant aisément à lacer mes souliers, j'étais loin d'être un athlète.

Et voilà que je me balançais à une distance inconcevable de ma terre ancestrale, douloureusement planté sur une bosse de chameau, enveloppé dans un nuage de gaz délétères qui auraient foudroyé un éléphant en bonne santé à plusieurs mètres de distance.

Grimmy

mardi 10 décembre 2013

Le Prisonnier du Caucase et autres nouvelles - Vladimir Makanine

prisonniercaucase.jpegVladimir Bakanine est un auteur russe né en 1937 ayant obtenu plusieurs prix pour son oeuvre (dont le prix européen de littérature en 2012). Les nouvelles du recueil Le Prisonnier du Caucase et autres nouvelles paraissent en français en 2005 chez Gallimard, dans la NRF, dans une traduction de Christine Zeytounian-Beloüs (en neuf, il faut donc compter 21 € pour cette édition).

Souvent présenté comme le dernier "classique russe" vivant, Vladimir Bakanine a en effet une plume particulière, presque "vieillie". Je trouve Gogol plus moderne dans ses Nouvelles de Saint-Petersbourg à vrai dire. Pas de franc coup de coeur donc pour ce recueil découvert par hasard (au gré d'une vente liée à un désherbage en médiathèque). J'ai trouvé que la langue était belle, que c'était intelligent mais je n'ai absolument pas été touchée, à part peut-être par la nouvelle "La Lettre A" qui met en scène un groupe de déportés en Sibérie résistant à leur manière à l'oppression. Je le relirai peut-être dans quelques années, mais là, c'est trop froid pour moi. Quelques extraits pour la route :

Les soldats ignoraient probablement que la beauté sauverait le monde, mais ils avaient tous deux une certaine notion de la beauté.

Depuis plus d'un an, les zeks travaillaient fièrement à leur grand et mystérieux projet qui consistait à graver un certain mot sur la falaise près du camp. Pour qu'il se voie de loin. Avant tout, cette inscription était le fruit d'un labeur librement consenti et ne relevait pas du train-train honni de la vie carcérale. (Pas plus que, par exemple, les réserves secrètes de biscottes ou le concert amateur monté pour le Premier Mai. Quand ils avaient récité des poèmes de leur composition consacrés au grand leader.) Et puis c'était un peu un défi, bien sûr. Au camp, les mots ne signifiaient plus grand chose.

Au déclin des ans... Assagie, et la tête déjà passablement grisonnante... Que ressent une femme qui toute sa vie n'a aimé qu'un seul homme? Rien. Absolument rien.

Grimmy

Pour aller plus loin : le discours de Makanine à l'occasion des 8e Rencontres européennes de littérature. Très beau texte, avec une réflexion intéressante sur les mouchards.

mardi 4 décembre 2012

Kitchen - Banana Yoshimoto

kitchen.jpgCertains passent le moins de temps possible dans leur cuisine, d'autres, comme le personnage principal de la nouvelle Kitchen, adorent les cuisines et s'y sentent en sécurité même pour dormir (pourtant, après avoir dormi des années dans des studios avec le bruit du frigo, je peux témoigner que vraiment Garelli -c'était le nom du frigo le plus bruyant que j'ai cotoyé- est en empêcheur de dormir en rond).

Kitchen est un best-seller japonais, écrit par Banana Yoshimoto quand elle avait 23 ans. Il a séduit toute une génération de Japonais (et de non Japonais) et raconte de manière sensible, sans pathos, le parcours d'une jeune femme de 20 ans, Mikage, qui se retrouve sans aucune famille après le décès de sa grand-mère. Comment va-t-elle composer avec le vide qui l'entoure? Comment pourra-t-elle continuer tout simplement à vivre? C'est ce dont traite Kitchen. Chacun fait ce qu'il peut, avec ce qu'il a. Mikage trouve ainsi refuge dans sa cuisine, puis chez un garçon qu'elle ne connaît que peu, Yûichi Tanabe. Surtout ne lisez pas la quatrième de couverture proposée par Gallimard, car vraiment, une fois encore, ils en disent beaucoup trop.

Dans cette édition, à la suite de Kitchen, vous pourrez lire Moonlight Shadow. Ces deux nouvelles forment un joli dyptique sur le deuil (et sur la vie). On pourrait leur reprocher, peut-être, de s'adresser surtout aux jeunes gens, et ce, dans un style simple, mais c'est aussi ce qui a probablement permis à toute une génération de s'y reconnaître (les défauts de ses qualités, tout ça...).

Je crois que j'aime les cuisines plus que tout autre endroit au monde. Peu importe où elles se trouvent et dans quel état elles sont, pourvu que ce soient des endroits où on prépare des repas, je n'y suis pas malheureuse.


Au moment où elle m'avait raconté tout cela, j'avais senti en gros ce qu'elle voulait dire, mais sans le saisir de l'intérieur, et j'avais pensé : "c'est peut-être ça, la joie de vivre..." Mais à présent, je le comprenais jusqu'à en avoir la nausée. Pourquoi a-t-on si peu le choix? Même si on se sent écrasé comme un vermisseau, on s'entête à préparer des repas, à manger, à dormir.


J'avais fini par avoir peur de la fatigue due au manque de sommeil, de ces longues heures passées à attendre seule, au bord de la folie, les premières lueurs du jour, et j'avais décidé de me mettre à courir.



Grimmy

lundi 25 juin 2012

L'Annulaire - Yôko Ogawa

annulaire.jpg Yôko Ogawa est une auteure (remarquez que je fais l'effort de mettre un e à la fin même si je trouve cela profondément laid) japonaise prolifique, dont l'oeuvre a été récompensée par des prix prodigieux (cela fait beaucoup de pro pour une intro).

Dans L'Annulaire, on entre très vite dans un univers bien inquiétant : un laboratoire discret où travaille la narratrice en tant qu'employée de bureau depuis qu'elle a perdu un bout de son annulaire dans la limonade (brrr, déjà associer un élément aussi rassurant que la limonade à un accident de travail dans une usine, c'est assez fortiche). Peu de personnes s'activent dans ce laboratoire très calme : la narratrice, son chef, M. Deshimaru, et deux vieilles dames, anciennes pensionnaires de l'ancien foyer de jeunes filles transformé en laboratoire de specimen. Oui,nous y venons, il ne s'agit pas ici d'un banal laboratoire d'analyse sanguine ou même d'expérimentation, non, ici on fabrique des specimen, à partir de souvenirs douloureux dont les clients souhaitent se détacher. Peu à peu le récit glisse et s'enferme ainsi dans un univers fantastique, inquiétant et aliénant. J'ai apprécié ce récit parfaitement maîtrisé qui ne tombe pas dans la facilité et se clôt en laissant le lecteur-voyeur un peu frustré de ne pas savoir ce qu'il se passe dans le laboratoire au sous-sol.

Ici, il n'y a ni ordres, ni obligations, ni règlements, ni slogans, ni services, ni réunion du matin. (...). J'aime beaucoup le laboratoire. Si c'était possible, j'aimerais y rester pour toujours. Je crois que M. Deshimaru m'y autoriserait.


Je n'avais aucune raison de refuser ce qu'il me réclamait. Je pensais qu'il était tout à fait naturel et anodin de marcher pour le remercier de m'avoir offert cette paire d'escarpins, mais il me semblait que dans le fond d'une baignoire c'était un peu trop singulier.


La cuisine est petite, mais elle contient toutes sortes de boissons et de gourmandises afin de répondre aux attentes de la clientèle. Mon travail est aussi de savoir à la vue du client ce qui peut lui plaire. La seule chose que je n'ai pas, c'est de la limonade.



Grimmy

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