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C'est mon premier roman de Mc Carthy. Je voulais du pêchu, du changement de décor et du sang. La moindre des choses est d'admettre que j'ai été servie.

Présenté comme un anti-western basé sur des faits réels sur la quatrième de couverture, Méridien de sang est en effet un roman assez atypique. Il conte les aventures d'une bande de chasseurs de scalps dans les années 1850. Le décor est aride et rude, comme les hommes qui le peuplent. Ni héros ni psychologie ni détails historiques. La narration est sèche et le style rugueux, tellement rugueux qu'au départ j'ai été irritée par les longues phrases sans ponctuation et par l'usage intempestif de la conjonction de coordination "et". Mais une fois pris au jeu, on se laisse emporter et hypnotiser par ce livre. Et c'est là que réside tout le talent de Mc Carthy. L'histoire et le style blessent, accrochent et entraînent les lecteurs dans un monde où une vie ne vaut quasiment rien. On meurt vite et en peu de mots chez Cormac. Pas de délayage, pas d'effets de suspense, il s'agirait presque d'un anti-roman finalement.

Presque, car le récit non-descriptif laisse tout de même émerger les figures extra-ordinaires de deux personnages bien trempés, le gars et le juge. Deux forces qui se confrontent et sont confrontées à une nature hostile (d'autant plus hostile si l'on y inclut ses habitants).

C'est un roman assez difficile où la sauvagerie est omniprésente. Mais il n'y a rien de gratuit : il ne s'agit ni d'un message prémâché ni de provocation, plus on avance dans la lecture, plus on entrevoit le sens du livre de Mc Carthy. Je crois qu'il faudrait certainement que je le relise encore pour me rendre compte de l'aboutissement de ce livre, pour voir davantage ce que j'ai uniquement pu entrevoir. En attendant, je ne peux que vous conseiller cette lecture et vous donner en pâture quelques extraits (âmes sensibles s'abstenir) :

Il s'élança avec la bouteille et le gamin esquiva et il s'élança de nouveau et le gamin recula. Quand le gamin le frappa l'homme lui fracassa la bouteille sur la tempe. Il tomba des planches dans la boue et l'homme plongea avec le culot déchiqueté et essaya de le lui enfoncer dans l'oeil.

La poussière séchait les crânes humides et dénudés des hommes scalpés et avec leur frange de cheveux au-dessous de leurs blessures et tonsurés jusqu'à l'os, ils gisaient maintenant dans la poussière saturée de sang pareils à des moines mutilés et nus et c'étaient partout des mourants qui râlaient et déliraient et des chevaux couchés à terre qui hurlaient.

On a pas toujours besoin d'une raison pour être quelque part.

Grimmy