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J'ai rencontré Une tragédie américaine de Kim Deitch à la bibliothèque. Je cherchais un petit one shot ou une intégrale et ai été attirée par le titre, puis convaincue par la 4e de couverture. Une BD chaudement recommandée par Art Spiegelman, j'étais pour le moins sûre que le scenario serait à la hauteur.

Et en effet, j'ai été embarquée dans le monde des comics américains (que je connais très mal) à travers l'histoire du pauvre créateur de Waldo (sorte de Félix le Chat très inquiétant). Pour tout dire, j'ai trouvé que c'est une BD un peu difficile d'accès, mais qui vaut vraiment la peine. Les références sont nombreuses et l'auteur nous offre des passages où se confondent folie et réalité, où les rêves basculent très vite dans le cauchemar.

Un créateur dont on trahit l'âme en rendant tout public et en aseptisant son génie, un personnage qui se rebelle en torturant son créateur et en s'imposant au narrateur, tel un génie malfaisant ressortant d'une pipe-lampe magique, des querelles internes et une contre-histoire de l'évolution des cartoons américains, voici ce que l'on trouve dans Une tragédie américaine.

Les dessins sont d'une richesse foisonnante (à en donner le tournis) et retranscrivent bien la folie des personnages. J'ai ressenti un assez grand malaise en lisant cette BD, peut-être parce qu'elle met en lumière à quel point le rêve aseptisé que l'on veut vendre aux enfants peut très vite se transformer en un monde cauchemardesque pour les artistes, peut-être aussi parce qu'elle s'affranchit allègrement des conventions du « joli ».

Pour le reste, je ne vais pas rentrer dans les détails des références et des mises en abymes que contient ce livre : les connaisseurs les trouveront d'eux-mêmes et les autres pourront consulter après leur lecture (comme je l'ai fait) de très bonnes analyses sur la Toile. Je préfère me contenter de vous conseiller à mon tour ce livre, qui permet d'approcher un monde de la BD un peu underground, hors des sentiers battus.

En voici deux extraits, un venant de l'introduction :

C'était le cartoon musical le plus fou, le plus coloré, le plus cosmique que j'aie jamais vu! Le maître de cérémonie était un chat insolent nommé Waldo. La seule information que j'ai réussi à soutirer à Nathan, c'était que l'étrange pipe avait appartenu à son oncle Ted.

Et un autre, venant du corps de la bd :

- Al, il faut que je te parle!
- Ha, Ted (heu) c'est pas vraiment le bon...
- Ecoute, on a parlé, Waldo et moi, et y pense que... je veux dire, je...
- Waldo ! Me dis pas que tu recommences à voir ce putain de chat! Bon, Ted, continue comme ça... et tu vas droit à l'asile!

Grimmy